06 mars 2019

Une hibernation troublée

On avançait doucement dans l’hiver. Ouistreham semblait être redevenue une bourgade paisible de la grande couronne caennaise. La mer était étale, le vent berçait avec délicatesse les nuits des bédouins et des racachis. Les migrants comme les arbres nus, le Dansoir ou les véhicules de la gendarmerie faisaient à présent partie du paysage. Romain Bail se faisait discret - échaudé peut-être par les conséquences passées de ses fanfaronnades. Les travaux, avenue de la Mer, battaient leur plein. lien . 





Un peu plus loin, au bord de l’eau, s’affairaient les poseurs de planches qui relieraient bientôt le poste de secours numéro un à la stèle commémorant les commémorations du 6 juin 2014. La mer était étale, le vent berçait avec délicatesse les nuits des bédouins et des racachis… qui n’étaient pas loin de céder au doux appel du sommeil.


Après le Beaujolais, le Romain Bail nouveau était arrivé : zen dans ses apparitions publiques, l’arrogance en quarantaine, à peine présent dans les médias, sans répit répétant qu’il préférait se tourner vers l’avenir, martelant sur les réseaux sociaux que seuls lui importaient ses administrés et le dynamisme de sa ville… Espérait-il, à dix-huit petits mois de la prochaine élection municipale, redorer un blason terni par plusieurs affaires judiciaires dont une au moins s’était soldée par un échec personnel ? S’efforçait-il d’édulcorer sa réputation d’homme colérique et entêté, n’écoutant que lui seul, n’agissant qu’à sa guise sans le moindre égard pour ses contradicteurs ? Toujours est-il qu’il semblait bien, mué en marchand de sable, vouloir endormir ses administrés et leur donner l’image d’un maire neuf, au-dessus de tout soupçon et d’une ineffable affabilité.
Romain Bail, ex-poulain prometteur des Républicains, celui-la même qui avait conquis l’imprenable bastion socialiste de Ouistreham et auquel on prédisait un avenir politique radieux, était-il en passe de se mettre en mode « François Hollande » ? 


Un maire normal pour une gouvernance normale ? Jugez-en. 

Acte 1 : fi de Caen-la-Mer et reprise de son activité d’enseignant. Pour être au plus près des gens, quoi de mieux que d’être au contact des djeun’s ? 
Acte 2 : fi des voyages aux quatre coins du monde ! Adieu donc le Cameroun, la Croatie, les States et la Nouvelle-Orléans, bonjour Colleville-Montgomery et Saint-Aubin d’Arquenay. En toute simplicité.
Acte 3 : fi du fameux Centre des Relations Franco-Britanniques – officiellement en suspens – et du million d’euros (estimation basse) dépensé pour rien autour de cette lubie initialement censée devenir « l’œuvre  d’un mandat ». 
Acte 4 : fi des ASVP qui jadis étaient spécialement recrutés pour rendre rentable le stationnement payant, on n’en embaucherait pas la saison prochaine ! 
Acte 5 : fi des grands de ce monde ! Adieu Bruno Le Maire, l’Ambassade de Grande-Bretagne à Paris et le PSG ! Bonjour le quartier de la Reine Mathilde et les joueurs de l’AJSO !  Fi donc, du strass et des paillettes, Romain Bail avait à l’évidence mis de l’eau de son chablis. 
Acte 6 : fi des grandes annonces ! Lors des traditionnels vœux du maire, en toute sérénité, sans coup d’ com’ ni trompette, la tête pensante du conseil municipal avait timidement annoncé sa candidature à sa propre succession, candidature qu’à peine quelques entrefilets dans Ouest-France et Le Liberté avaient relayée dans les jours qui suivirent
Acte 7 : ben il n’y a pas encore d’acte 7. Mais on peut bel et bien affirmer qu’à l’instar de son magazine LE CAP – trois numéros en quatre mois en 2016, puis trois parutions en un an en 2017, deux en 2018 – les frasques de Monsieur le Maire s’étaient réduites à peau de chagrin. Et force est d’admettre qu’on ne pouvait que s’en réjouir, un maire simple et discret nous paraissant plus souhaitable à la tête de notre ville qu’un élu agité et bling-bling qui flatulerait plus haut que son postérieur. Aussi désireux, à présent, de se fondre dans la foule que jadis prompt à accéder aux feux de la rampe, Romain Bail pouvait désormais profiter des soldes pour lèche-vitriner incognito ! Il pouvait enfin goûter aux joies d’être l’élu sans pour autant se la jouer au dieu odieux. Parce que dans sa communication aussi, changement de dircom oblige, le loup aux dents longues était devenu doux agneau ! Alleluia ! lien


Et puis, patatras... Car voilà, le naturel revient au galop quand on s’échine à le chasser, et les efforts de l’élu pour se racheter une conduite furent ruinés en une soirée lors du dernier conseil municipal, préparatoire au prochain qui sera le théâtre du toujours tumultueux vote du budget. Sur un air de déjà vu mais qu’on osait penser révolu, Romain Bail y vit ses nerfs mis à rude épreuve et renoua avec ses vieux démons : affrontements stériles et peu cordiaux avec l’opposition, ricanements goguenards et réparties prétendument cinglantes – qui ne firent (sou)rire que les membres de la majorité, allusions récurrentes à l’équipe municipale précédente, moquée par celui qui honora pourtant son prédécesseur du statut de maire honoraire de la commune… Et partirent en fumée, en une soirée, tous les espoirs de ceux qui avaient cru déceler une certaine volonté d’apaisement dans la récente attitude du maire. Une question, alors, se posa inévitablement : pourquoi ce retour aussi brusque qu’inattendu de la nervosité ‘édilique’ ? Un élément de l’actualité récente nous donne sans doute une réponse…lien


Je ricane

En effet, de même qu’après la pluie vient le beau temps, souvent le calme précède la tempête… Il avait beau être – (ap)paraître ? – zen, monsieur le Maire, quelques jours avant le conseil municipal évoqué plus haut, la justice était revenue lui rappeler l’existence d’un dénommé « tribunal correctionnel ». Une histoire de procès verbaux, refit surface. Résumé de l’affaire : officier de police judiciaire puisque maire de la commune, Romain Bail aurait dressé une série de procès verbaux dénoncés comme abusifs par ceux qui en étaient destinataires : entre autres, l’ancien maire d’Hérouville-Saint-Clair, François Geindre ainsi que la directrice d’Emmaüs. Sanctionnés par notre maire pour stationnement gênant. Une dizaine de plaignants, tout de même : on ne peut donc pas parler d’acte isolé. De là à parler de malveillance… Pis, certains de ces procès-verbaux seraient entachés d’irrégularité(s) … Enfin, quelques-unes des personnes verbalisées se défendent de s’être garées sauvagement, et font état d’un stationnement de quelques minutes sur un emplacement ne mentionnant aucune interdiction. De là à parler d’abus de pouvoir… lien


Bien sûr, on nous mettra en garde, arguant à juste titre de la présomption d’innocence. Certes. Mais pour une fois qu’innocents, nous le sommes, nous, petits bédouins du Petit Bédouin, dans cette histoire, permettez-nous, non pas de nous réjouir, mais d’être dépités par ce nouvel épisode qui, mettant encore une fois en cause notre maire, écorne une fois de plus l'image de notre ville. Ouistreham serait-elle en passe de devenir le Levallois-Perret du 1-4 ? La suite dans le prochain épisode, en juin, avec la comparution de Romain Bail au tribunal correctionnel. Puis la suite de la suite dans le prochain épisode, en octobre, avec le jugement en appel de l’affaire dite du « faux mail »... Netflix en fera-t-il une série ?

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