L'histoire de notre commune au lendemain de la grande guerre 14-18 est indissociable de l'arrivée à sa tête d'un homme qui fut maire de Ouistreham durant près de 25 ans Monsieur Alfred Thomas.
Alfred Thomas
Un maire ami de diplomates, ministres et artistes
Tout au long d'un quart de siècle de mandat, il eut à coeur de faire connaître sa ville au monde diplomatique et politique comme M. Édouard Herriot, plusieurs fois ministre et maire de Lyon durant 47 ans, le sénateur Boivin Champeaux. Il devint même l'ami intime de M. Aristide Briand, Ministre des Affaires Étrangères et prix Nobel de la Paix pour son action durant la guerre 14/18. Ce dernier passait souvent ses vacances sur son yacht "Simounelle" et il finit par acheter une maison le long du canal au Maresquier, toujours existante. Il fut également l'ami du savant et explorateur Mr Jean Charcot dont le bateau le "Pourquoi pas" mouillait souvent dans le port.
Le monde artistique sous son égide vint à Ouistreham : le dessinateur Montmartrois Poulbot, Georges Simenon qui fit de Ouistreham le cadre de son roman "le port des brumes".
Alfred Thomas mit au service de ses multiples mandats, son intelligence, sa clairvoyance et sa volonté pour mener à terme les projets qu'il jugeait nécessaires et bénéfiques à la ville. Il sut mettre à profit ses relations politiques pour se faire ouvrir les portes des ministères afin d'arriver au but recherché et obtenir satisfaction pour le bien de la commune.
Alfred Thomas et son Conseil municipal
(7eme en partant de la gauche au 1er rang)
Un Maire batisseur et visionnaire
Il s'employa avec ardeur et persévérance à faire d'un petit village normand une station balnéaire réputée pour ses bains de mer iodés, ses loisirs et son ambiance familiale loin de toutes mondanités. Ce projet nécessita bien des transformations.
Avant son élection le bord de mer allant du cabinet de radiologie jusqu'au bout de la digue soit les boulevards Boivin Champeaux, Kieffer et Joffre n'étaient que d'immenses dunes domaine privilégié des lapins et des herbes folles.....surnommées "les Lais de Mer". En 1923 la ville acquis ces lais de mer des Domaines et Alfred Thomas prit l'initiative d'y faire percer rues et avenues dans le prolongement de voies déjà existantes. Et ainsi de la jetée du port de Ouistreham jusqu'à Colleville fut créé le long boulevard existant toujours en front de mer. Vers 1925 par adjudication, de nombreux terrains aux alentours furent acquis par des propriétaires qui y firent construire des villas.
A l'entrée de la rue de la mer, à côté de l'Hôtel de la Plage s'élevait le premier Syndicat d'initiative construit en 1925. Il était situé à quelques mètres près à l'emplacement de l'actuel office du tourisme. Tout à côté se trouvait le magnifique casino normand qui avait remplacé le Kursall en bois. Ce splendide bâtiment était une vaste et élégante construction de style néo-normand qui devint le fleuron de la station après son inauguration le 27 juin 1931. C'était la grande fierté d'Alfred Thomas. LPB vous en contera l'histoire dans un prochain article.
Alfred Thomas et son conseil municipal encouragèrent et aidèrent financièrement beaucoup de sociétés privées et d'associations. Ainsi virent le jour sous son mandat : le Tennis-Club, le Comité des Fêtes, la Société des Régates, le Syndicat d'initiative, la Société du Casino, le Club des Boulistes, le Golf Miniature (qui se trouvait avenue Foch), l'association et Jeunesse Sportive ainsi que la salle des fêtes Michel Cabieu et la naissance du premier groupe scolaire en lieu et place de l'ancienne école qui se trouvait à l'intérieur de la mairie.
Un Maire de progrès
Il décida d'installer dès son élection, dans toute la ville, le premier réseau d'eau potable et l'installation de l'électricité. Mais pour parvenir à ces deux objectifs, il fallait que la commune soit classée "station climatique". En 1923 le Ministère de l'hygiène, Assistance et Prévoyance accorda cette classification et dès octobre de la même année, les travaux commencèrent par le bourg puis le bord de mer et en 1935, la commune avait son réseau.
En ce qui concerne l'électrification, la municipalité trouva des supports et le Ministère de l'agriculture donna une contribution de 30 000 frs. De 1923 a 1926, la distribution électrique se développa dans toute la commune.
Afin d'assoir l'image de "station balnéaire", la viabilisation des quartiers fut décidée avec l'aide des propriétaires qui se groupèrent en association et versèrent une taxe de propriétaire syndical tandis que la mairie versait une subvention de 20 000 F à partir de 1937. Il servit en outre de caution pour tout emprunt de l'association. Le bon fonctionnement de cette association et les excellents rapports avec la mairie permirent la création d'autres associations syndicales : celle de la Pointe du Siège, celle du lotissement du Valpre-Labbé, créée en 1931et celle du lotissement "Maruitte" autorisée en 1936.
Enfin de 1921 à 1935, les principales rues desservant le bourg seront goudronnées et munies de trottoirs, des immeubles seront abattus pour faciliter la circulation tandis que de nouvelles rues sont tracées. De nouveaux quartiers naissent et viennent se greffer à ceux déjà viabilisés comme les Charmettes, Mariotte, Aumont, Valpre-Labbe. Des jardins publics sont créés aux abords du casino afin "de donner à cette partie de Riva un aspect attrayant et surtout de supprimer la poussière" comme le souhaitait le maire. Des terrains seront achetés pour devenir les premiers "parkings" et la rue de la Mer la première rue construite et habitée deviendra le "pôle" essentiel de la station balnéaire.
Un Maire "amoureux" de sa commune
Alfred Thomas oeuvra dura 25 ans pour " SA commune". Il éprouvait une réelle passion à la développer, la faire connaître, la faire prospérer en partie sur ses fonds privés. Il y réussira au delà de ses espérances puisqu'elle est toujours "la perle" de la côte de Nacre comme il la rebaptisa.
Il fut nomme Chevalier de la Légion d'honneur en 1927 et promu au grade d'officier en 1939.
Mais la deuxième guerre mondiale anéantira tragiquement l'élan de prospérité de notre station balnéaire qui fut détruite en grande partie lors du débarquement.
Après avoir assisté impuissant au démontage du casino par les allemands pour en faire une fortification, il mourut le 6 février 1943 et repose dans le cimetière de cette commune qu'il aima tant et qui n'aurait jamais été sans lui ce qu'elle est aujourd'hui.
Sa mémoire demeure sur la grande place à côté du Square du Belvédère qui porte le nom de ce "GRAND MAIRE" de Ouistreham Riva-Bella que fut Monsieur Alfred Thomas.
SOURCES :
- Histoire de Ouistreham des origines à 1939 de Monsieur Jean PROVOT 1975;
- Ouistreham Riva-Bella OMAC 1994;
- Ouistreham Riva Bella Office du Tourisme 2011;
- Archives municipales et départementales.